CCOB/COBS

Musicologie et politique
Musicology and Politics

Catherine Harrison Boisvert (OICRM)

Cette communication vise à situer la pertinence méthodologique de la reconstitution musicale dans une démarche historiographique féministe, en s’appuyant sur le cas de la musique écrite dans le contexte du mouvement américain de lutte pour le suffrage féminin. En me penchant sur les différentes modalités de mise en musique de la question du droit de vote féminin, je souhaite mettre en évidence les apports et les enjeux d’une démarche incluant l’interprétation vocale de documents d’archives. Par cette recherche, j’envisage la partition en tant que trace expérientielle dans un contexte de lutte politique, offrant des outils significatifs à l’historiographie des mouvements sociaux.




9m 17s

Judy-Ann Desrosiers (OICRM)

Cette présentation vise à réfléchir sur la façon dont a été défini la musique espagnole au moment où l’école espagnole s’est formé à la fin du XIXe siècle autour de Felip Pedrell (1841-1922) et de ses élèves dont les plus connus sont Isaac Albéniz (1860-1909), Enric Granados (1867-1916), Manuel de Falla (1876-1946) et Roberto Gerhard (1896-1970). Nous nous intéresserons plus particulièrement au discours tenu par le musicographe et compositeur français Henri Collet (1885-1951) à propos de la musique espagnole dans ses ouvrages Albéniz et Granados et L’essor de la musique espagnole au XXe siècle. Nous verrons qu’il définit la musique espagnole selon deux paramètres, soit un paramètre esthétique et un paramètre national. Nous réfléchirons aux limites posées par cette définition et nous montrerons comment une approche transnationale de la musique espagnole permet de dépasser plusieurs problèmes soulevés par la définition de Collet.

7m 51s

Elsa Fortant (OICRM)

Nous vous proposons de découvrir la scène techno montréalaise à travers le regard des publics qui la composent. Grâce à des données récoltées par l’entremise d’un questionnaire diffusé sur Internet auprès des amatrices et des amateurs de techno et des entretiens semi-dirigés menés en 2019, nous démontrerons qu’il n’existe pas une mais plusieurs scènes techno qui cohabitent à l’échelle de la ville de Montréal. Cette enquête ouvre une fenêtre sur l’expérience et le statut des publics de techno montréalais et sur les dynamiques sociales à l’œuvre au sein des scènes techno de la métropole.

7m 29s
Emmanuel Heisbourg

In this paper, we will investigate whether emotion-inducing music, which has been largely used in campaign ads, shapes citizens’ perceptions of candidate traits. By inducing emotions that, in turn, affect opinion formation, it is plausible to assume a link between music and how the candidates in campaign ads are perceived. Methodologically, we will conduct a laboratory experiment in which we will expose individuals to a random sequence of five campaigns ads, either with or without their original, emotion-inducing music. We will subsequently compare individuals’ perceptions on four trait dimensions: Competence, honesty, compassion and leadership. Our analyses will shed light on whether emotion-inducing music used in campaign ads affects perceived traits.

7m 28s
Matilde Legault (OICRM)

Composé entre 1920 et 1924, puis créé en 1926, Turandot est le seul opéra de Giacomo Puccini utilisé dans la propagande fasciste italienne dont la création a eu lieu après le début du régime en 1922. Complété par Franco Alfano un sympathisant fasciste qui voulait briller auprès de Mussolini, l’opéra représente, de l’aveu même de Puccini, un hommage au Duce. Turandot, qui comporte des éléments musicaux exotiques mais aussi modernes, ne reflète cependant pas la définition traditionnelle du nationalisme musical italien, qui se traduit essentiellement par la musique lyrique romantique. Étant donné ces caractéristiques, comment l’opéra a-t-il pu être récupéré par le régime?
L’utilisation de Turandot permet d’exposer plusieurs idéaux inhérents au régime fasciste. L’œuvre est par ailleurs un parfait exemple des différentes incohérences artistiques de la propagande culturelle du gouvernement mussolinien, qui mise simultanément – et de façon souvent paradoxale – sur la tradition et la modernité.
 

7m 15s

« We’re the real ambassadors » : Ambiguïté politique des musiciens jazz dans la diplomatie culturelle américaine (1956-1962)

Alexandre Villemaire (OICRM)

Pendant la Guerre froide, les États-Unis ont mené une offensive de diplomatie culturelle contre l’URSS sous l’égide du Cultural presentations program, un programme d’échanges artistiques dans le cadre duquel plusieurs musiciens américains ont été envoyés à l’étranger afin de promouvoir l’idéal américain. Le jazz a occupé dans ce programme une place particulière. Deuxième genre musical en importance dans le programme, le jazz a bénéficié d’une promotion soutenue de musiciens et d’intellectuels qui le présentaient comme typiquement « démocratique ». Étant donné la position ségrégationniste du pays de l’Oncle Sam vis-à-vis la communauté afro-américaine, principale représentante du jazz, cette association est hautement ironique. Cette communication propose donc d’interroger l’ambigüité politique du programme culturel américain et de ses acteurs, notamment Louis Armstrong, Dizzy Gillespie et Dave Brubeck, en faisant appel entre autres à la notion de propagande grise (Jowett & O’Donnell, 1999[2014]), ainsi qu’aux définitions de la diplomatie culturelle proposées par Mulcahy (1999) et Kessler (2018). La mise en parallèle de ces notions permet de montrer comment les musiciens jazz ont été mis au service d’un projet politique qu’ils n’appuyaient pas nécessairement, dans le cadre d’une dynamique musico-politique qui se situe à l’intersection (parfois inconfortable) de la diplomatie et de la propagande.

7m 28s